Partie II. Inflation au Canada : où il est possible que nous nous dirigions
La bonne nouvelle, c’est que nous avons commencé à constater des signes de ralentissement du taux d’inflation au Canada au cours de la dernière année. Par exemple, vers la fin de 2022, les prix de nombreux produits et services (c’est-à-dire les coûts liés à la nourriture et au logement, attribuables à des taux hypothécaires et à des loyers plus élevés) sont demeurés élevés, mais les augmentations de prix ralentissaient. Comme le montre le tableau 2, l’IPC annualisé des biens au Canada a atteint un sommet d’environ 11 % en juin 2022 (ligne dorée), et l’IPC annualisé des services peut également avoir atteint un sommet d’environ 5,6 % en décembre 2022 (ligne bleue). De plus, bien que le taux d’inflation global le plus récent en avril ait été légèrement plus élevé d’un mois à l’autre, l’inflation globale demeure bien en dessous des hauts sommets de 2022.
Cela est dû au ralentissement des indicateurs économiques les plus importants, puisque les taux d’intérêt au Canada ont augmenté rapidement, et à un affaiblissement des perspectives des entreprises canadiennes, selon le sondage sur les perspectives d’affaires de la Banque du Canada – premier trimestre de 2023, qui a montré des perspectives de ventes modérées et une diminution des pressions du marché du travail par rapport aux niveaux élevés. Nous avons également constaté une baisse des prix de la plupart des produits de base tandis que les pressions sur les chaînes d’approvisionnement diminuaient; les coûts d’expédition mondiaux ont diminué et les prix des produits comme les voitures d’occasion ont redescendu de leur sommet. Aujourd’hui, la situation au Canada semble moins complexe que bon nombre de ses homologues mondiaux. Les anticipations d’inflation ont diminué, et la Banque du Canada prévoit qu’elle ralentira à 3 % d’ici la mi-année avant de revenir à la cible en 2024.
Le tableau 3 corrobore ces prédictions en illustrant une relation étroite entre l’indice des prix à la production canadien avancé sur 1 an et les mesures d’inflation privilégiées de la Banque du Canada – l’IPC-tronq et l’IPC-comm. Comme le tableau l’indique, les prix plus bas auxquels les producteurs font face devraient se traduire par des mesures plus basses de l’IPC à court terme.
Remarques : IPC-tronq est une mesure de l’inflation fondamentale qui exclut de l’IPC les composantes dont les
taux de variation, au cours d’un mois donné, se situent dans les queues de la distribution des variations de prix.
Cette mesure permet de cerner et d’exclure les variations de prix extrêmes qui pourraient être causées par des facteurs spécifiques à certaines composantes. IPC-méd est une mesure de l’inflation fondamentale qui correspond à la variation de prix se situant au 50e centile de la distribution des variations de prix au cours d’un mois donné, pondérées selon les poids des composantes dans le panier de l’indice des prix à la consommation. Cette mesure permet de cerner et d’exclure les variations de prix extrêmes spécifiques à certaines composantes. Cette approche est similaire à celle de l’IPC-tronq, puisqu’elle élimine toutes les variations mensuelles pondérées des prix autant du bas que du haut de la distribution des variations de prix dans un mois donné, à l’exception de la variation de prix de la composante qui est le point médian de cette distribution. IPC-comm est une mesure de l’inflation fondamentale qui extrait les mouvements communs des prix entre les catégories du panier de l’IPC. Cette mesure utilise une procédure statistique, soit un modèle d’analyse factorielle, pour détecter les variations communes et, donc, elle permet de cerner et d’exclure les variations de prix qui pourraient être causées par des facteurs spécifiques à certaines composantes.
Comme le précise le tableau 4, nous prévoyons que l’inflation canadienne devrait être modérée à un taux plus faible et plus stable, et se rapprochera de la cible de 2,0 % de la Banque du Canada au cours de 2023-2024.
Certes, bien que nous croyions que l’inflation au Canada diminuera au cours des deux prochaines années, le sujet demeure complexe. Malgré la récente série de mesures indiquant que nous allons dans cette direction, il reste des forces inflationnistes persistantes dans les marchés du logement et du travail.
Nous tentons de résumer les complexités de la situation dans le tableau 5 en comparant les tendances potentielles inflationnistes et désinflationnistes sur des périodes à court, moyen et long terme.
Voici certains des facteurs qui influenceront à plus long terme l’inflation ou la désinflation au Canada et au Québec :
- L’infrastructure verte, y compris la transition de l’énergie, comprend les investissements publics et privés pour se retirer des sources d’énergie moins coûteuses, qui pourraient initialement être inflationnistes. Cependant, il est probable qu’au fil du temps, ces sources d’énergie alternatives nous fassent réaliser des économies d’échelle grâce à des mesures incitatives fiscales ainsi qu’à des taux d’adoption plus élevés, et deviennent désinflationnistes.
- La démondialisation et la délocalisation intérieure peuvent initialement être inflationnistes – cela comprend les projets visant à éviter les longs délais d’exécution et les grandes chaînes d’approvisionnement, la recherche de produits et de fournisseurs plus près de la maison, et le passage des stocks « juste-à-temps » aux stocks « au-cas-où ».
- Faible participation de la main-d’œuvre – à mesure que les gens sortent de la population active (pour prendre leur retraite, par exemple), une pénurie de main-d’œuvre peut placer plus de pouvoir de négociation entre les mains des employés, ce qui exerce une pression à la hausse sur les salaires. Le potentiel de croissance de la productivité en raison des progrès technologiques (p. ex., intelligence artificielle, robotique) peut venir compenser cette situation.